L'Étudiant Libre

Akira, ou l’énième malaise de la jeunesse woke

Le 19 septembre, date cruciale de l’Histoire de notre continent, a eu lieu à Paris une surprenante entreprise de communication portant sur une - énième - candidature indépendante à la Présidence de la République qui pourrait bien ne pas créer la surprise pour 2022 : celle d’Akira.
Akira, ou l'épième malaise de la jeunesse Woke
Akira, ou l'énième malaise de la jeunesse Woke. Crédit photo : Akira (Twitter)

« Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien. » Si Socrate avait eu le bonheur de vivre en France en 2021, il aurait pu rajouter « et aussi qu’on vit dans une sacrée époque ». Pensez donc, entre l’ukase impérieux et impérial de présenter son Ausweiß sanitaire pour avoir le droit de boire un verre (quand ce n’est pas de simplement travailler), les photographies toutes mignonnes de nos camarades moudjahidines barbotant comme de grands enfants en pédalo sur les lacs de Band-e Amir (AK-47 en relâche arrière nonobstant) et la somptueuse robe « Tax the Rich » d’Alexandra Occasio-Cortez (dont le salaire de prolétaire rien que pour son activité au Congrès atteint la modique somme de $174 000) au Gala du MET (où le prix minimum du ticket est de $30 000), avouez que l’antique Hellène en aurait probablement perdu son Latin…

La dernière bizarrerie ayant attiré l’attention de notre équipe et qui, j’espère, vous aura échappé, provient du domaine politique, domaine qui n’a pas manqué ces dernières années de nous fournir des perles, des crèmes et autres précieuses pépites qui feront la joie de nos arrière-petits-enfants lorsque l’INA de l’an 2100 repassera le best-of de la campagne présidentielle…

J’en vois déjà qui trépignent au fond ; hélas, je suis en devoir de les décevoir, puisque, quand bien même ma plume tremble à l’idée d’évoquer ce sujet, cet article n’abordera pas la délicieuse Sandrine Rousseau. Tristesse et désolation, je sais, mais remballez vos mouchoirs, on reste sur la lancée de la présidentielle, puisqu’une nouvelle candidature a été lancée le dimanche 19 septembre, et pourrait bien ne pas créer la surprise pour 2022 : celle d’Akira.

Ce 19 septembre donc, date cruciale de l’Histoire de notre continent, a eu lieu à Paris une surprenante entreprise de communication portant sur une (énième) candidature indépendante à la Présidence de la République. Si vous n’étiez pas dans le coin du musée Carnavalet ce dimanche, pas de panique : la vidéo immortalisant ce haut fait d’armes est en ligne sur Youtube, vous pourrez ainsi la saigner à profusion à l’image de votre serviteur qui s’est imposé une décortication méticuleuse de ce chef-d’œuvre rien que pour vous. La chance.  

Blousonnée de cuir, masquée telle un Zorro de Paname, encadrée par deux pseudo-gardes du corps tout droits sortis d’un mauvais remake de Matrix, une jeune inconnue proclame ainsi son manifeste politique. Le ton est exalté, le texte élégant, le verbe haut ; techniquement, force est de reconnaître que c’est un sans-faute, le discours appris par cœur est maîtrisé à la virgule près. Le résumer en quelques mots ne sera pas affaire trop compliquée puisqu’il semble que les différents révolutionnaires modernes se sont tous mis d’accord pour recycler le même credo (à défaut du tri sélectif hélas) : après une accroche apocalyptique où l’on apprend que le ciel, le monde et les océans brûlent, que des gens sont partout tués en raison de leur race ou leur sexualité, que les femmes sont massacrées  (sans vraiment définir d’aire géographique néanmoins, même si l’on se doute bien que ce ne sont ni les Afrikaners du Transvaal ni les Serbes du Kosovo qui sont ici évoqués), Akira ose « rompre le rang ». Collectif plus que parti, Akira nous invite à un nouveau monde où l’étranger n’est plus une menace et où le travail n’est plus une souffrance, et nous incite à rejoindre la « révolution » sans pour autant avoir l’intention de diriger ni de gouverner, mais plutôt « d’écrire une histoire collectivement ».

Collectif plus que parti, Akira nous invite à un nouveau monde où l’étranger n’est plus une menace et où le travail n’est plus une souffrance

Wladimir de chikovani

Outre le côté mièvrement naïf du « programme » et la mise en scène se croyant probablement subversive, classique chez les Che Guevara en peau de lapin, une réalité assez symptomatique de notre époque affleure dans cette vidéo : il s’agit du décalage qui se creuse de plus en plus entre une grande partie de la jeunesse française et la politique au sens large. Si les candidatures de l’humoriste maintenant président Volodymyr Zelensky en Ukraine ou de l’animateur de télévision Donald Trump ont pu surprendre par leurs succès chez les jeunes envers et contre toutes les statistiques, elles comptaient tout de même un programme relativement étoffé, nourri de propositions concrètes et d’axes politiques.

Ici, la parfaite illustration de ce que 30 années de pédagogisme, de débats citoyens en cours d’éducation civique, d’inclusivité et de moraline bien-pensante à l’école peuvent donner s’offre à notre regard ; une aspiration lointaine à un processus révolutionnaire contre un pouvoir mal défini, tantôt le patriarcat, tantôt le pouvoir blanc, tantôt l’oligarchie hétérosexuelle ; une dénonciation vague de la perte progressive de libertés, ici mise à mal par l’usage de masques chirurgicaux parce que quand même, Octobre 1917 oui, mais COVID-19 non ; une vision apocalyptique du futur, où les déluges de feu embraseront l’atmosphère si l’on ne réduit pas la vitesse à 30 km/h à Paris ; et enfin une espèce de refus libertaire de toute forme d’autorité et de hiérarchie, nécessairement fasciste car non-horizontale. Au final, un alignement total avec les délires woke des campus américains, le côté islamo-trotskyste en plus.

Ce qui est réellement affolant dans cette histoire, bien plus que ce chapelet d’idées naïves, c’est que des jeunes gens, dont une grande partie de nos lecteurs et rédacteurs peuvent se sentir, quelque part, solidaires par l’âge, aient pu avoir l’idée même de se lancer dans cette entreprise gaguesque en se prenant au sérieux. Nous sommes tous familiers, du temps de notre lycée ou de notre faculté, avec les débats interminables face à ce même genre de personne ; lorsque l’adversaire progressiste n’arrivait pas à produire la moindre démonstration logique, le moindre chiffre ou exemple historique concret, mais se contentait de balancer à la volée des généralités infâmes telles que « le travail c’est dur », « le sexisme c’est mal », « personne n’a le droit de séparer des familles » ou « il faut que tout le monde soit heureux » ? C’est pourtant bien ce qui transpire dans cette vidéo ; un minuscule vernis de culture politique, dégoulinante d’admiration bête et béate pour les Rosa Parks, Megan Rapinoe, Bruce Jenner et autres prophètes du libéralisme ; une détestation naïve et enfantine du danger fasciste, du Klan et de la Chrétienté (le tout dans le même sac) ; et surtout une vie déconnectée, « dans le monde des idées » (puisque le maître-à-penser de Platon a introduit notre propos) où la subversion migratoire, l’insécurité, le chômage et la misère sociale ne sont pas des priorités. Cela n’a d’ailleurs pas loupé, puisque l’enquête menée par Libération a établi que plusieurs membres du collectif étaient des étudiants, anciens ou actuels, de « l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) et de la Sorbonne à Paris ». La plupart défendant sur des réseaux sociaux des positions antifascistes, antiracistes, féministes, proches du mouvement Extinction Rébellion… Bref, pas une surprise.

Ici, la parfaite illustration de ce que 30 années de pédagogisme, de débats citoyens en cours d’éducation civique, d’inclusivité et de moraline bien-pensante à l’école peuvent donner s’offre à notre regard

Wladimir de chikovani

Il est alarmant de constater que notre génération, celle du COVID, du pass sanitaire et du confinement, se désintéresse à ce point du politique pour laisser à une énième bande de bourgeois, étudiants éternels et sculpteurs de fumée professionnels, salivant sur le compte Twitter de Kamala Harris et adeptes de slogans subtils nous incitant à leur détruire le clito plutôt que le climat, s’approprier le sentiment de révolte et l’inquiétude de la jeunesse française. Car ne nous y trompons pas ; des Akira, il y en a dans chaque campus, dans chaque lycée, dans chaque université, et de plus en plus. On se souvient tous de la fameuse Juliette, étudiante à Tolbiac, qui s’était décomposée devant Robert Ménard au moment du blocage de sa faculté ; c’était elle aussi, à sa manière, une sorte d’Akira. Certes, les Akira et leurs partisans ne représentent qu’une partie infime des étudiants, mais constitue néanmoins une petite meute bruyante qui, devant l’indifférence de la majorité des jeunes à l’égard du politique et surtout la timidité des jeunes nationalistes, prend en otage les revendications de la jeunesse française.

Aussi, soyez-en sûrs ; si ce collectif a eu la démence de soumettre une démonstration ridiculeusement pitoyable et naïve aux regards de la sphère publique, c’est qu’on ne leur a jamais coupé la parole, qu’on ne leur a jamais opposé une contradiction ferme, qu’on a jamais inféodé leurs théories fumeuses à l’université. Soyez-en convaincu : aux Etats-Unis, les jeunes conservateurs ne se laissent pas faire. Le travail énorme abattu par Ben Shapiro, Candace Owens et Charlie Kirk pour ne citer qu’eux, à Turning Point USA ou à la Young America Foundation, fait qu’une droite étudiante solide existe et mène le combat culturel et politique avec panache et, souvent, avec succès. Si bien que, quoi qu’il arrive, quand on est aux Etats-Unis et qu’on souhaite porter ses aspirations politiques devant le peuple électeur, même en étant gangrené par la déliquescence moderniste, on le fait sérieusement, car le camp d’en face ne laissera rien passer.

Akira n’est pas la jeunesse nationale, ni la génération COVID, même si elle est symptomatique de ses errements. La jeunesse de France, si elle compte porter au pouvoir une droite forte et réellement conservatrice, doit combattre, par tous les moyens, même pacifiques, en tous cas logiques et rationnels, cette folie importée d’outre-atlantique, et qui, manifestement, supporte bien mieux le ridicule que les contradictions. Il est de notre devoir, à l’heure où une nouvelle génération un peu plus sensible aux idées politiques va accéder au vote en 2022, de débattre, de témoigner, de propager nos idées avec la même certitude que les 12 Apôtres ont répandu l’Evangile par-delà les sept mers. D’autant que ladite génération a la possibilité d’être nourrie de nombreux intellectuels brillants tels qu’Eric Zemmour, Charlotte d’Ornellas, Matthieu Bock-Côté, Julien Rochedy et tellement d’autres qui, au contraire des pionniers Dominique Venner, Maurice Bardèche, Jean Mabire ou Alain de Benoist, bénéficient d’une exposition médiatique suffisante pour que la voie de la dissidence ne soit pas réservée à des initiés spécialistes des combles de l’internet politique. D’ici là, il ne tient qu’à nous de voter correctement à la prochaine élection présidentielle et de renvoyer réellement toutes les Akira de France et de Navarre à la dure réalité : celle d’une minorité agissante, bruyante et gênante, totalement déconnectée des problèmes du peuple, avec laquelle la jeunesse nationale, et certainement pas la jeunesse étudiante, n’a strictement rien à voir.

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Wladimir Chikovani

Akira, ou l’énième malaise de la jeunesse woke
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