L'Étudiant Libre

Des écologistes arrosés au gaz russe ?

Les possibles financements de certains partis et ONG écologistes par la Russie sont un vrai sujet de souveraineté, sur lequel il est impératif de se pencher.

Le problème énergétique de la France pose un vrai défi de souveraineté. En cause, la hausse constante des importations d’électricité faute de production suffisante. Et encore, le pays rencontre de sérieuses difficultés d’approvisionnement depuis que le courant est coupé avec la Russie. En octobre 2022, les présidents des groupes parlementaires de l’AN ont donc décidé de créer une commission d’enquête « visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France ».

Depuis cet automne, les anciens gouvernants défilent pour répondre au douloureux interrogatoire des députés. Au cours des auditions, tout le monde se dérobe sur la question du démantèlement du nucléaire. Manuel Valls a bien voulu être un peu plus précis. Selon lui, si François Hollande a souhaité réduire la part du nucléaire à 50%, c’était pour conserver le soutien des écologistes.

Depuis des années, les activistes écologistes entreprennent systématiquement d’attaquer toute production énergétique durable et souveraine. Le combat féroce contre le nucléaire est particulièrement troublant. Alors que cette source d’énergie ne dégage quasiment pas de CO2, les mouvements écologistes européens (spécialement) exigent de la remplacer par des énergies fossiles qui produisent bien plus de gaz à effet de serre.

Les activistes ont aussi attaqué le gaz de schiste jusqu’à faire plier les gouvernements. Américains et Européens pensaient que cette ressource pouvait les rendre moins dépendants des importations, notamment celles venues de l’est.

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La Russie ne pouvait accepter qu’on lui retirât la manne du gaz alors qu’elle commençait tout juste à revenir sur la scène internationale. Plus largement, la dépendance énergétique des États envers elle lui donnait des leviers essentiels pour sa politique extérieure.

Alors, comment attaquer le gaz de schiste et le nucléaire ? Peut-être en finançant ceux qui y sont naturellement opposés : les écologistes.

Alerte aux US

En 2017, deux parlementaires américains de la commission des sciences de l’espace et des technologies, Lamar S. Smith et Eddie Bernice Johnson, adressaient un courrier au Secrétaire d’État au Trésor. Ils exigeaient l’ouverture d’une enquête sur le financement d’organisations écologistes américaines par le gouvernement de la Fédération de Russie.

Selon eux, les fonds russes pouvaient arriver par une société basée aux Bermudes, où il n’est pas nécessaire de justifier l’origine des virements, contrairement aux États-Unis. Ils ont relevé que les principales organisations écologistes américaines, comme le Sierra Club ou League of Conservation Voters Education Fund, recevaient indirectement dix millions de dollars par an depuis une société aux Bermudes. Toutes ces organisations étaient particulièrement virulentes contre le gaz de schiste américain.

Quelle situation pour l’Europe ?

Dans un article du 19 juin 2014, The Guardian citait le Secrétaire général de l’OTAN Anders Fogh Rasmussen qui portait l’accusation suivante :

« Nous partageons l’inquiétude de certains alliés, qui craignent que la Russie ne tente d’entraver d’éventuels projets d’exploration du gaz de schiste en Europe afin de maintenir la dépendance de l’Europe à l’égard du gaz russe. »

Bien sûr, les États-Unis sont toujours ventre à terre pour exporter leur gaz en Europe. Ils ont donc tout intérêt à révéler ce genre de marchés pour remplacer les Russes. Mais, ça ne change rien aux faits.

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Le directeur de la Fondation pour l’innovation politique (FONDAPOL), Dominique Reynié, par ailleurs professeur à Sciences Po, a récemment expliqué comment Gazprom influençait les politiques énergétiques européennes. Pour lui, l’entreprise gazière russe passerait par les écologistes. Il cite notamment l’exemple de la Belgique.

Si on regarde de plus près, l’actuelle ministre fédérale belge de l’Énergie, Christinne Van der Straeten, du parti écologiste Groen, était avant sa nomination associée à 50% d’un cabinet d’avocats dont l’un des gros clients était Gazprom. Devenue ministre, Mme Van der Straeten s’est alors employée à démanteler le parc nucléaire belge tout en faisant construire des centrales à gaz[1]. C’était en fait l’objectif des écologistes depuis une vingtaine d’années.

Les possibles financements de certains partis et ONG écologistes par la Russie sont un vrai sujet de souveraineté, sur lequel il est impératif de se pencher.

[1] LE SOIR, https://www.lesoir.be/380668/article/2021-06-25/sortie-du-nucleaire-les-declarations-de-tinne-vander-straeten-sont-incorrectes, 25/06/2021

Aurélien Charvet

Aurélien Charvet

Responsable du site internet de L'Étudiant Libre, étudiant en grande école
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