L'Étudiant Libre

Les chasseurs : la proie des progressistes

Pratique essentielle à la survie des premiers hommes, puis privilège de la noblesse, la chasse est aujourd’hui un loisir démocratisé. Pourtant, elle est sans cesse attaquée par la gauche, dont les arguments trouvent parfois écho dans la population. 

Selon un sondage IFOP de mars 2021, 55% des Français sont opposés à la chasse. Pourquoi un loisir populaire, au sens le plus large, est-il victime d’une défiance grandissante ? Au-delà de l’acharnement médiatique et politique, de l’endoctrinement d’une partie de la jeunesse par des idéologues antispécistes, quelles sont les raisons de l’impopularité de cette pratique ? 

L’invisibilisation de la mort par la sécularisation et l’industrialisation 

La première raison est peut-être celle de l’évolution du rapport à la mort dans notre société. La sécularisation exercée tout au long du XXe siècle et l’affaiblissement du catholicisme qui en découle ont considérablement modifié notre rapport à la mort. Alors que la mort était perçue à l’époque comme un passage vers la vie éternelle, la fin du matériel, mais non du spirituel, elle est aujourd’hui la fin de tout, l’extinction de la vie, la peur de tous et donc, un réel tabou. Ainsi, la mort nous est devenue insoutenable, si bien qu’elle n’est plus tolérable même pour les animaux. 

Le développement de l’élevage industriel, de la consommation de masse a inévitablement acté le fort recul de l’élevage domestique. Les clapiers à lapins sont vides, les porcs ne sont plus que dans les abattoirs, et les volailles pondent, décorent, et gardent la tête sur les épaules . La viande est maintenant présentée comme un produit brut et sans sang. L’élevage, mais surtout la mise à mort, le dépeçage, l’étripage, le découpage sont invisibilisés. Ces techniques ne sont visibles qu’au sein des groupes de chasseurs, coupables d’être les seuls à être responsables de leur consommation de viande, du début à la fin. 

La deuxième raison de cette défiance est l’évolution de notre rapport à l’animal. Là encore, la sécularisation importe. La Genèse donne à l’Homme, doté d’une âme, une place nettement supérieure aux autres créatures de Dieu qu’il est censé maîtriser. Cependant, la théorie évolutionniste et sa politisation par les détracteurs de l’Église, puis les mouvements écologistes et animalistes tentent de placer l’Homme au rang d’animal. Si cette vision de l’humanité tend à désacraliser la vie humaine et légitimer l’IVG, l’euthanasie et d’autres questions éthiques, elle amène aussi à sacraliser la vie animale. L’augmentation du nombre d’animaux de compagnie montre la place qu’ont prise ces derniers dans nos vies et la renforce. 

Un combat idéologique 

En outre, la chasse est sûrement détestée par la gauche, car les chasseurs sont représentés, à tort ou à raison, comme tout ce qu’elle haie. Les chasseurs sont un symbole : de vieux hommes grisonnants, hétérosexuels, consommateurs de viandes, assassins sanguinaires, virilistes, détenteurs d’armes à feu, attachés aux traditions et aux coutumes, électeurs de droite et d’extrême droite. Voilà pour Sandrine Rousseau un peu plus d’un million d’hommes à déconstruire. 

Enfin, nul ne peut penser que les multiples faits divers et accidents de chasse n’ont pas d’incidence sur l’opinion publique. Évidemment, la surmédiatisation de ces faits, aussi bien sur les réseaux sociaux qu’à la télévision, renforce leur conséquence. 

Maintenant que nous connaissons les raisons morales, philosophiques et idéologiques du mauvais procès fait à la chasse, qu’en est-il concrètement ? Quels sont les arguments concrets des détracteurs ? 

Les paradoxes écologistes 

Bien que la chasse soit avant tout une quête, et non une mise à mort, le premier et le plus entendu des arguments porte sur la maltraitance animale. Or, quel animal souffre moins que ceux prélevés à la chasse ? Quel animal a pu connaître tant de liberté ? Les écologistes militent depuis toujours pour des élevages en plein air, mais maudissent la chasse qui prélève le gibier dans son milieu naturel, en pleine liberté et loin des enclos. Certes, il existe des lâchers d’animaux d’élevage. Mais une perdrix prélevée par un chasseur, qu’elle soit née en liberté ou qu’elle n’ait été lâchée qu’un mois avant, aura toujours une vie plus belle qu’un poulet élevé en batterie ou dans un enclos, aussi grand soit-il, qui sera par la suite transporté et enfin abattu. Tout animal prélevé à la chasse a connu la liberté, et le plus souvent aucune clôture, contrairement à tout autre animal d’élevage. Il faut donc voir en la chasse, le mode de production le plus proche du bien-être animal, car il est le plus naturel. 

L’argument portant sur la chasse à courre nécessite une réponse davantage philosophique. Comment peut-on prôner un retour à l’état de nature le plus initial, et s’horrifier que des prédateurs (les chiens de meute) traquent une proie et parfois parviennent à la tuer ? C’est sans doute là, le mode de chasse le plus naturel, le plus proche de l’instinct animal. 

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Le prélèvement de gibier n’est pas l’unique rôle ou objectif de la chasse 

Ce serait une grossière erreur de résumer le rôle des chasseurs et fédérations de chasse à celui du prélèvement. Qui plantent chaque année 20 000 km de haie ? Qui abreuvent chaque été les gibiers assoiffés ? Qui a permis la préservation de centaine d’espèces comme celle du lièvre dans la Vienne, dont la population connaît un véritable regain ? Qui a fait de la lutte contre le braconnage une priorité, si bien que cette pratique est devenue marginale ? Tant de missions que les chasseurs ont accomplies et accomplissent. 

La mission la plus importante des chasseurs est celle de la régulation, notamment pour la population grandissante des sangliers. Ces derniers pénètrent de plus en plus souvent les villes et causent de gros dégâts sur les champs et les routes. 

La sécurité : un défi surmédiatisé 

L’argument qui entache sûrement le plus la chasse est celui de la sécurité. Pourtant, depuis 20 ans, les accidents de chasse sont en nette baisse en France. Avec 8 décès, la saison 2021-2022 est toutefois en légère augmentation par rapport à celle de 2020-2021 qui comptabilise 7 décès. Mais, nous sommes loin de la trentaine d’accidents par an, enregistrée il y a 20 ans avec 39 drames en 1999-2000. Ce sont bien sûr 8 décès de trop, mais à mettre en perspective avec le nombre de chasseurs actifs : 1,1 million. 

À titre de comparaison, une vingtaine de personnes sont mortes en moyenne chaque année dans les stations françaises de ski, selon un rapport du Système national d’observation de la sécurité en montagne publié en 2020. Selon ce même rapport, entre 2010 et 2020, ce sont 495 personnes qui ont trouvé la mort en randonnée pédestre en montagne, et 163 durant des activités aériennes. La chasse n’est donc pas le loisir le plus accidentogène, même si la surmédiatisation des faits divers peut le faire penser. 

Il ne s’agit pas d’excuser, de normaliser ces 8 morts, mais la solution ne réside pas dans la suppression de cette pratique, mais plutôt dans une meilleure formation de ses pratiquants. Si la formation pratique du permis de chasser est obligatoire et très rigoureuse sur le thème de la sécurité, les générations de chasseurs les plus anciennes sont passées au travers. Cependant, le plan gouvernemental, présenté en ce début janvier 2023, prévoit une formation pratique obligatoire pour l’ensemble des chasseurs tous les dix ans. 

Un portrait socio-politique souvent caricaturé 

En ce qui concerne les attaques davantage idéologiques, l’idée selon laquelle la chasse serait un loisir de privilégiés est évidemment fausse. Parmi les chasseurs, 55% sont des actifs (ce qui démontre qu’interdire la chasse le dimanche revient à la supprimer), parmi eux on compte 36% de cadres, 38% d’ouvriers et employés, 18% d’indépendants et 7% de professions intermédiaires selon l’étude sur l’Impact Économique et Social de la Filière Chasse par le BIPE (2014-2016). Nous constatons que cette pratique est essentiellement populaire, même s’il peut exister des rapports de classes au sein de la chasse, notamment autour du type de chasse, des organisations de chasse, et du type de gibier. 

Pour ce qui est du caractère supposé viriliste, si les femmes ne représentent que 2% des pratiquants (25 000 environ), elles représentent 10 à 15% de ceux qui passent le permis chaque année, ce qui montre qu’elles ne sont pas exclues de cette pratique. De plus, la chasse n’est pas le seul loisir genré. 

Sur le plan plus politique, plusieurs études montrent que les chasseurs forment un électorat homogène même si les électeurs de Marine Le Pen y étaient surreprésentés en 2017. Deux choses sont à noter : le vote droite/ « extrême-droite » est surreprésenté en milieu rural, et ce n’est pas une spécificité des chasseurs, mais surtout il n’est pas interdit de penser différemment que la NUPES. Officiellement, le Président de la fédération nationale des chasseurs a appelé à voter pour Emmanuel Macron dès le premier tour de l’élection présidentielle de 2022. Il ne faut pas non plus négliger le poids que représente la chasse dans l’économie française : 2,29 milliards de valeurs ajoutées, mais aussi 25 800 emplois et un bénévolat équivalent à 50 000 emplois. 

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En somme, il existe une forte causalité entre affaiblissement des valeurs catholiques et rejets de traditions telles que la chasse ou la corrida qui cassent le « tabou de la mort ». Symbole d’un monde et de valeurs à détruire pour la gauche, la chasse est victime d’attaques idéologiques et d’arguments fallacieux.Néanmoins, un travail de formation reste à faire au sein des chasseurs. Sur ce point, le plan gouvernemental emboîte le pas. Il est nécessaire d’expliquer la chasse plus en profondeur, et c’est ce à quoi s’attelle la Fédération Nationale des Chasseurs et son Président Willy Schraen, pour mettre en exergue l’absurdité des arguments de ces opposants et démontrer sa nécessité. 

 

Image de Marin Baudouin

Marin Baudouin

Chef de notre antenne à Poitiers et membre de la rédaction du site Internet de l'Etudiant libre
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