C’est officiel ! Jordan Bardella est sacré président du Rassemblement national avec 85% des voix, le 5 novembre à la Maison de la Mutualité à Paris, alors que le parti fête ses 50 ans. Du haut de ses 27 ans, il avait face à lui le cinquantenaire Louis Aliot, maire de Perpignan et ex-mari de Marine Le Pen, qui remporte 15% des voix. Jordan Bardella, tout comme Emmanuel Macron a rapidement gagné en popularité, et ce malgré son jeune âge.
Deux personnalités, deux vécus
De Drancy à Amiens, 140 kilomètres séparent les villes de naissance du poulain de Marine et de celui de Brigitte. De la cité HLM de Saint-Denis à la maison bourgeoise provinciale, leurs origines contraires expliquent leurs parcours et leurs idées opposées. Le jeune président du RN, issu de la classe moyenne, a vécu au cœur de la banlieue du neuf-trois, dans un HLM de cité, d’un père patron de PME et d’une mère agent territorial spécialisé des écoles maternelles. Très attaché à sa figure maternelle, le banlieusard est élevé seul par sa mère : « elle m’a élevé dans la difficulté financière de Drancy. Elle ne possédait comme seul patrimoine que la dignité d’une femme de devoir », explique-t-il lors de son premier discours en tant que président du RN.
Emmanuel Macron, lui, n’aspire pas à la même enfance de banlieue. Né dans une famille bourgeoise d’Amiens, d’un père médecin, professeur de neurologie et d’une mère médecin-conseil de la sécurité sociale, il passe son enfance dans une somptueuse maison, loin du brouhaha du 93. Élevé par sa grand-mère maternelle, le petit Emmanuel s’appuie sur ce pilier affectif pour construire son projet et entame une voie studieuse.
Les deux hommes brillants obtiennent le baccalauréat avec mention très bien, Economique et social pour le président du RN, Scientifique pour l’actuel Président de la République. Jordan Bardella décide de rester dans son département attractif et obtient une licence de géographie. Militant à l’UNI, il arrête ses études pour se consacrer pleinement à la vie politique. Emmanuel Macron suit le chemin classique des hommes politiques. Il s’installe sur les bancs de l’ENA, puis devient inspecteur des finances en 2004, et trouve une place au bureau de la banque d’affaires Rothschild & Cie. Tous deux ont un CV bien rempli. Bardella connaît le terrain périlleux de la Seine-Saint-Denis, Macron fait ses armes derrière un bureau financier.
Leurs parcours politiques commencent tôt. Bardella adhère au Front national à 16 ans. A 19 ans, il devient le plus jeune secrétaire départemental du FN de Seine-Saint-Denis, puis assistant parlementaire du député européen Jean-François Jalkh. Macron prend sa carte au PS à 29 ans. En 2012, il participe à la campagne de François Hollande, puis est nommé secrétaire général adjoint du cabinet du Président de la République. En 2014, encore inconnu de la sphère « mainstream », il est nommé Ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique. Les Français entendent parler de lui avec la « Loi Macron », il commence à lever les foules… contre lui.
En 2015, Jordan lance le collectif « Banlieues patriotes », et son slogan « Musulmans peut-être mais Français d’abord ». Macron voit un peu plus grand : il fonde son parti En Marche en 2016, en vue de la présidentielle de 2017 qu’il remporte face à Marine Le Pen.
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« Marine Le Pen n’a pas dit son dernier mot »
Les deux hommes sont présidents : l’un du plus grand parti de France, le Rassemblement national fort de ses 83 000 adhérents, l’autre de la République française. Jordan Bardella devient le plus jeune président de parti en 2022 et Emmanuel Macron, le plus jeune président de la République, en 2017. Bardella, tout comme Macron, incarne le renouveau, l’avenir, la modernité et semble bien parti pour arriver au pouvoir dans cinq ans. Décrit comme l’homme parfait, surdoué de la politique, quelque peu providentiel, il trace son chemin et ne dévie pas. Il sait d’où il vient et c’est sa force pour accomplir ses missions.
L’objectif du président du parti est de porter le Rassemblement national à l’Élysée en 2027. Emmanuel Macron, ne sera pas candidat, comme écrit dans l’article 6 de Constitution de la Ve République : « Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct. Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs. » Quant à Marine Le Pen, elle peut cumuler les candidatures, jamais deux sans trois. Sera-t-elle candidate pour la troisième fois ? Ou laissera-t-elle la place à son protégé ? Bryan Masson, député des Alpes-Maritimes, a son avis sur ce sujet : « Marine Le Pen n’a pas dit son dernier mot », confie-t-il lors du XVIIIe Congrès, convaincu de voir une femme à l’Élysée dans cinq ans. En attendant 2027, Jordan Bardella va renforcer les fédérations, occuper le terrain des territoires et des idées comme il l’a toujours fait en Seine-Saint-Denis, poursuivre l’ouverture du parti et faire émerger une nouvelle élite pour la France avec un projet d’école afin de repérer les futurs talents du RN.
L’orateur du RN sait parler aux jeunes, il lui reste donc cinq ans pour les séduire jusqu’aux urnes.
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