La Marche des Fiertés, une sortie familiale

“Les enfants ont toute leur place à la Pride !” La préfecture décompte 56.000 participants à la Marche des Fiertés 2023 (ex-Gay Pride), samedi 24 juin à Paris. Parmi eux, sous un soleil de plomb, quelques enfants accompagnent leurs parents. Ceux-ci ne sont pas gênés par les fesses poilues fendues de strings à hauteur de leur visage, au contraire ! Immersion dans un évènement où l’ultrasexualisation est devenue bon-enfant.
Avec les éphèbes égéries de SexoSafe, le site “des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes”, soutenu par Santé Publique France.
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Il faut tout de suite ouvrir aux enfants le champ des possibles

Bermuda et chemise bleu ciel négligemment vissés sur son corps flasque ; Nicolas est ravi. Il a 38 ans, et marche sa première “Pride”, la Marche des Fiertés LGBTQ+ organisée par l’association Inter-LGBT chaque année à Paris. Julie, trois ans, somnole dans sa poussette. “Il faut tout de suite ouvrir aux enfants le champ des possibles”, confie son père. Enthousiaste, il déclare : “Je serais heureux que ma fille soit LGBT !”. Christelle, 46 ans, est venue de Chartres pour l’événement : “Il faudrait que l’on voie plus de familles, pour normaliser le combat”, explique-t-elle en zozotant. Il manque une incisive aux dents jaunes de la génitrice de la petite Clémence, 5 ans, née d’une PMA.

La Place de la Nation est bondée. Des hommes en tenue de cuir d’inspiration sadomasochiste dansent en riant, des dizaines des jeunes femmes aux sourcils pailletés le suivent. La musique Freed from desire les électrisent, la transpiration coule à flot sous le soleil de 14h. Les odeurs corporelles sont fortes. Ces lycéennes et étudiantes de 15 à 25 ans sont sont en minishort et en soutif, les hommes… aussi, ou bien torse nu. Un homme en costume de Deadpool s’ajuste le pénis à travers le tissu ; sa main frotte la tache de sueur qui trace un cercle gris sur son entrejambe. D’autres sont plus sages, en pantalon et t-shirt, seulement maquillés d’arcs-en-ciel.

Marius, arrête de souffler dans cette capote !

François, cadre fraîchement divorcé, est venu de Perpignan avec ses quatre fils. Marius, 10 ans, souffle dans un préservatif pour le gonfler, mais le lubrifiant lui complique la tâche ; il tente sans succès de l’enfiler sur son menton et manque de tomber. “Marius, arrête de souffler dans cette capote !”, dit son père, qui tente d’exposer sa démarche éducative. “Très jeunes, les enfants voient tout sur les écrans, même des blagues homophobes”. François est soudain très sérieux. “C’est pour leur bien-être, il faut qu’ils voient que dans la vraie vie, il y a de l’humour qui ne se fait pas”. Marius a sa main entière dans le préservatif, mais au moins, il n’écoute pas Dieudonné ou Papacito.

Marie est venue avec sa nièce. La jeune femme de 30 ans est habillée d’une grande robe rouge digne d’un cours de tango, la petite fille y est lovée pour s’abriter du soleil. La nudité de certains participants de la Pride ne la gêne pas : “Il y a toujours eu des enfants à la Pride, et c’est très bien”. Elle agite son bras grassouillet sur lequel est tatoué une figure de tarot. “Chacun fait ce qu’il veut ! Je ne suis pas choquée par la sexualisation. Ma nièce non plus. Hein, Clarisse ? Tu réponds au monsieur ?” Clarisse, peu coopérative, est assommée par la chaleur moite, et ne m’octroie qu’un léger coup d’œil.

Habituer les enfants à la sexualité et à la nudité, cela fait partie de la vie !

De nombreux parents évoquent une “libération du corps”, bien différente d’une sexualisation. Anne-Julie et Sophie sont en longue robe, elles sortent d’un baptême. “Une année, on a vu deux hommes se faire une fellation sur un balcon, pour ambiancer la Pride. Bien sûr que c’est provocateur, ne nous cachons pas, cela fait partie du folklore queer : leurs revendications étaient à l’origine portée sur la sexualité”. Nullement indisposées, elles cacheront les yeux de leur fille (achetée par GPA aux États-Unis) si cela se reproduit. Hervé, cadre marseillais accompagné de ses deux filles, “dédramatiserait” dans le cas d’une gâterie sous les yeux de la famille. “Je n’ai aucun souci à habituer mes enfants à la sexualité et la nudité, cela fait partie de la vie”. Ses deux enfants ont la tête à hauteur des centaines de sous-vêtements masculins moulants. A défaut de “dédramatisation”, les enfants ont un bon cours d’anatomie.

 

J’arrive pas à garder ma quéquette au repos !

 

Dominique Boren est le coprésident de l’Association des parents gays et lesbiens (APGL), créée en 1986. Sa fille de 12 n’est pas là, mais “n’a pas le choix” de venir chaque année quand son emploi du temps le permet. “La sexualisation n’est pas qu’à la Pride, elle est partout ailleurs… C’est un moment festif, on fête la joie d’être ensemble. Si les enfants sont choqués, on les protège. C’est une question de sensibilité”. Cet appel à la subjectivité des enfants semble des plus pertinents. Une vingtaine d’enfants sont assis dans un petit train affrété par l’association. Deux minutes plus tard, un participant torse nu hurle à son compagnon : “J’arrive pas à garder ma quéquette au repos, je suis trop content !” Nul doute que les enfants de la Pride le sont aussi, ravis de découvrir avec leurs parents le fameux folklore queer.

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Image de Paul Derey

Paul Derey

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