Une pensée artificialisée ?

Qui aurait pu croire que l’IA Chat GPT connaîtrait un aussi grand succès ? En réalité, le monde. Depuis son lancement en décembre 2022, l’intelligence artificielle de Microsoft fait couler beaucoup d’encre. Les esprits s’enflamment, certains se réjouissent d’une telle avancée technique, d’autres conservent une attitude plus froide, plus distante. La majorité, elle, comme à son habitude, ne possède aucun avis sur la chose, elle l’a acceptée, l’use et l’adhérera à son mode de vie.

Qu’est-ce que Chat GPT ? Chat GPT est une intelligence artificielle mise au point par Open IA. Cette agence de développeurs a créé un système informatique intelligent capable de converser avec celui qui l’active. Il puise ses informations d’internet et en fait une synthèse dans l’objectif d’apporter la réponse la plus juste et la plus objective possible. Afin d’éviter l’échec cuisant de l’IA Tay devenue violente, et dirait-on peu politiquement correct, parce qu’elle avait puisé ses sources sur Twitter, les ingénieurs d’Open IA ont fait de Chat GPT une IA incapable de comprendre les émotions et surtout une IA à laquelle s’applique les mesures de censure imposées à internet (interdiction des propos xénophobes, racistes, LGBTphobes, etc.). Le but de Chat GPT est d’apporter la satisfaction d’une réponse à une question précise. L’IA permet de comprendre et de synthétiser davantage d’informations que ne le peut l’intelligence humaine. D’aucuns s’émerveilleront, d’autres s’inquiéteront. 

Nous ne sommes pas sans nous douter que l’apparition d’un tel progrès technique apporte son lot d’inconvénients. Le système éducatif a du souci à se faire. Déjà les faits de triches se multiplient, les enseignants réclament des mesures contre l’IA, les écoles s’arment contre les dérives. On a pu le voir avec Sciences Po qui a lancé tout un programme de réflexion sur l’utilisation intelligente et raisonnée de Chat GPT.  Est-il alors de bon ton de se servir de l’IA comme outil pédagogique ? Comme avec l’arrivée progressive de l’ordinateur et du téléphone à l’école, l’utilisation d’une IA telle que Chat GPT risque de conduire à un nouveau nivellement vers le bas des élèves qui perdront en capacité de recherche, d’analyse, d’esprit critique et enfin, d’esprit de synthèse. Nous pouvons pour mieux comprendre la situation reprendre les mots du philosophe Michel Serres dans Petite Poucette « la boîte-ordinateur contient et fait fonctionner ce que nous appelions jadis nos facultés ». Ainsi, permettre aux élèves d’user d’un outil qui a pour vocation d’imiter et de remplacer à terme leur capacité de raisonner ne présage rien de bon. 

Les créateurs de l’IA ont voulu faire de leur algorithme un système neutre. Alors que Sonia Mabrouk interrogeait Chat GPT sur Europe 1, l’IA s’est défini comme étant « programmée pour promouvoir les valeurs de respect et d’inclusion » tout en « restant un programme conçu pour donner des réponses objectives et impartiales aux questions qui lui sont posées ». C’est pourquoi, pour elle, la France est une terre d’accueil construite économiquement et socialement par l’immigration, « le genre est une construction sociale » et il faut « célébrer la diversité des identités de genre ». Effectivement, Chat GPT est impartial. Alléluia. Le problème résiderait ainsi seulement dans le fait que l’IA est détenue par une minorité qui par l’usage de cet outil ultra technologique peut tout contrôler : les pensées, les opinions, les valeurs dites universelles, ce qui est audible et ce qui ne l’est pas. Déjà que de nombreux faits démontrent que les gens prennent les informations venues d’internet, des réseaux sociaux et autres comme fiables et vraies, il va être de même avec les propos de Chat GPT et des intelligences artificielles qui seront développées. Leurs dires seront considérés comme la vérité absolue par une majorité. La même majorité à qui on aura enlevé la capacité de penser dès son plus jeune âge, à l’école. Comme quoi tout se recoupe. L’IA finira par créer deux groupes : une élite minoritaire, qui sera en mesure de se servir des outils technologiques en plus de son intelligence, et une majorité, composée de ceux qui n’auront que leur cerveau pour vivre et se développer. 

Les IA sont alors le prochain gros enjeu technique des pays. Ceux qui les posséderont seront, si on se permet l’expression, les maîtres du monde. L’intelligence artificielle, encore plus développée, aura des capacités énormes. Elle sera créatrice de richesses étant donné qu’on pourra lui demander d’accomplir de nombreuses tâches : d’imaginer, de programmer, de calculer, de rédiger, d’inventer, etc. La France ne doit pas négliger l’importance de la rechercher autour des IA si elle ne veut pas se placer comme pays du Tiers-Monde parce qu’elle aura manqué le départ de la nouvelle course aux technologies de pointe. S’ajoute à cela le fait que comme dans tous les domaines d’innovation, les groupes qui sont devenus les plus puissants suite au développement de la dernière révolution technologique sont rarement ceux qui sont à l’origine de la nouvelle invention. La nouveauté demande le renouveau de tout le système.  Les puissants d’aujourd’hui ne sont pas forcément les puissants de demain. Ainsi, la France, quoi qu’on puisse penser de l’intelligence artificielle, ne peut pas se permettre de ne pas activement participer à ce développement si elle désire garder sa place, déjà peu stable, de puissance mondiale. 

Maîtriser les intelligences artificielles est alors une nécessité pour la France. Il faut cependant que leur développement soit accompagné d’une pensée et d’une juridiction afin qu’elles ne soient pas au service d’une élite, mais au service de tous, au nom du Bien commun, dans le respect de l’intégrité intellectuelle et morale de l’Homme.

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Jacinthe d'Arjac

Jacinthe d'Arjac

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