Tour du monde littéraire : Nathaniel Hawthorne

Inaugurant un tour du monde littéraire par Nathaniel Hawthorne, portons donc aujourd'hui nos regards vers l’Amérique du XVIIe siècle, déjà en proie à ses contradictions entre rigueur religieuse et désir de liberté, vécues à travers le destin d’une pécheresse.

Né à Salem dans le Massachussetts, Nathaniel Hathorne (il ajoutera le w à son nom lorsqu’il publiera ses premiers écrits sous pseudonyme) décide de vivre de sa plume aussitôt ses études supérieures achevées. Il s’enferme alors pendant près de 10 ans chez sa mère et commence par écrire des contes qu’il parvient à publier dans des revues. Le bon accueil de la critique contribue à le sortir de l’ombre avant qu’il ne retombe dans une discrétion proche de l’apathie, vidé de toute énergie créatrice. Ses emplois à la douane de Boston puis de Salem (1839 – 1849) lui assurent des revenus modestes jusqu’à ce qu’il se fasse licencier à la suite de l’élection d’un gouverneur. Six mois plus tard, la mort de sa mère agit comme un électrochoc ; pris d’une soudaine impulsion, il rédige trois romans dont celui qui deviendra a posteriori son chef-d’œuvre, La Lettre écarlate publié en 1850. Malgré une série de voyages en Europe, le romancier sombre dans la maladie et la dépression. Il s’éteint finalement en 1864, laissant derrière lui une œuvre composée en grande partie de nouvelles.

Son œuvre principale est marquée par le poids du passé. Dans Le Bureau des Douanes, le texte semi-autobiographique qui sert d’amorce à La Lettre écarlate, Hawthorne affirme qu’une légende entoure ses ancêtres, tenus pour de sévères puritains qui auraient persécuté des femmes adeptes de magie noire, les « sorcières » de Salem. Un dialogue imaginaire s’engage ensuite entre deux de ses ancêtres, indignés de voir leur descendant choisir le métier des lettres. Comme si la faute commise par les aïeux rejaillissait sur les enfants en influençant leur parcours. Cette préface sert à introduire le thème clé qu’Hawthorne va décortiquer sous tous ses aspects : la malédiction.

Un miroir de la société américaine

Nous sommes à Boston, en 1647. La trame principale du roman s’articule autour de la vie d’Hester Prynne, une jeune femme condamnée à porter sur sa poitrine un emblème infamant ; une lettre écarlate, symbolisée par un A en référence à son crime (adultère). Pour ne rien arranger, elle a fermement refusé de livrer le nom de son amant, également père de son enfant. Mise au ban de sa communauté, elle part vivre dans les bois, isolée, dans une maison à la périphérie de la ville. Commence ainsi pour elle un long chemin vers l’acceptation de sa dégradation en compagnie de sa fille, enfant qui ne cessera de la tourmenter, sous le regard réprobateur, curieux et compatissant des différents habitants du village. 

Le lecteur sera donc libre d’apprécier ce portrait d’une Amérique encore jeune, dont les traits de caractère sont déjà observables. Terre de liberté, d’espoir et de renouveau, elle n’échappe pas à un puritanisme anglo-saxon constitutif de l’identité du pays.

Des scènes vives et puissantes

Servi par un style riche et élaboré, le récit d’Hawthorne alterne entre dialogues, descriptions psychologiques et événements, avec en toile de fond un éventail de décors allant d’une nature sauvage et impénétrable aux demeures rustiques de Boston. Sans dévoiler davantage l’intrigue, nous dirons au lecteur que l’histoire est dominée par les relations qu’entretiennent trois personnages, tous liés à un lieu symbole de la honte publique : le pilori. Dans ce cadre, le roman nous offre des moments intenses en émotion, soigneusement préparés en amont par l’impression de dénouement qui rythme les grandes phases de l’histoire.

Tous des pécheurs ?

À partir du cas d’Hester et des autres personnages, Hawthorne nous invite à nous pencher sur nos propres fautes ; la nécessité d’en comprendre le sens, la visibilité et les moyens de les effacer. 

Sommes-nous condamnés à les porter éternellement ? Un vice caché pèse-t-il plus sur notre conscience que sa révélation au grand jour ? Notre descendance en pâtira-t-elle ? Toutes ces questions qui hantaient l’écrivain lui-même nous sont aussi soumises. Gardons-nous de juger hâtivement semble nous conseiller Hawthorne, du moins pas avant d’avoir examiné notre propre situation.

À titre personnel, l’auteur de cette chronique recommande ce roman à tous ceux qui veulent découvrir le visage d’une Amérique dans ses origines, faire la connaissance d’une pénitente pleine de résignation et de courage ; enfin, se confronter à la question du péché et de ses retombées.

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Guillaume d'Aiglemont

Guillaume d'Aiglemont

Etudiant en M2 à l'IEP de Strasbourg, Guillaume s'occupe des sujets internationaux au sein de l'équipe de rédaction du site
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