L'Étudiant Libre
Mercredi 17 novembre, le rappeur Orelsan a dévoilé le clip de sa musique « L’odeur de l’essence ». Il
s’agit pourtant plus d’un pamphlet politique où l’on retrouve les mêmes obsessions et mêmes
slogans que ceux de la bourgeoisie mondaine artistique.

« Du grand génie encore la claque qu’ils se prennent la haut j’espère !!!! Encore une fois il a tout exploser en 1 track. »
C’est l’un des nombreux commentaires qui trône fièrement sous le nouveau clip d’Orelsan qui s’intitule
« L’odeur de l’essence » qui provient de son dernier album « Civilisation ». J’admets ne pas avoir tout
compris en le lisant, le style est maladroit et bien sûr on retrouve une volonté de simplification en utilisant un
« 1 » pour dire « un » (c’est vrai que l’on gagne un temps incroyable en l’écrivant comme cela), ainsi que
l’anglicisme habituel qui est comme la cerise sur le gâteau. Il est rédigé par Morgane qui semble encore toute
émoustillée face aux textes de son rappeur préféré. Il pourrait même faire pâlir Baudelaire de honte, tant ce
dernier est un petit joueur face à Orelsan. Bien sûr ce n’est pas le seul retour de ce style. Il y en a des milliers,
et quand je vois la réaction d’une très grande partie de la jeunesse ivre de rap, je ne peux qu’être envahi par
une sérieuse inquiétude.
En l’espace de quelques décennies, le rap est devenu le style musical de prédilection de la jeunesse. Ce qui
est inquiétant n’est pas spécifiquement l’écoute de ce style en particulier. En son temps, chaque génération
avait sa propre culture musicale, même si je persiste sur le fait que le rap est une sous-culture qui éveille les
passions les plus primaires. Il faut également rappeler, même si c’est une évidence, que le rap est un vecteur
de haine envers les institutions, la police, l’État et donc par analogie la France.
Mais la critique du rap n’est pas le sujet de ce dit article, et nous aurons l’occasion j’en suis sûr d’aborder
cette problématique plus en détail prochainement. Le problème est surtout le fait que la nouvelle génération
n’écoute que cela. Il suffit de regarder les classements sur les plus grands sites d’écoute, et d’apprécier le fait
qu’il n’y a quasiment que du rap dans le top dix voire le top cinquante. Alors bien sûr, on retrouve un
florilège d’artistes – autoproclamés – jetables. On peut les reconnaître facilement, car ils remplissent un cahier
des charges bien spécifique. Ils sortent un tube, souvent dans l’été pour permettre à Vanessa et Britney de se
sentir rebelle au cours de ses vacances soit au Cap d’Agde soit à Palavas-les-Flots, option libertinage
possible. Très souvent, ces rappeurs sont approchés par un gros poisson pour signer dans un label qui va
avoir pour nom une expression de la rue ou faire référence à un film de Gangster : au hasard les Affranchis ou
encore Scarface. Là encore l’originalité est de mise. Ils feront une interview pour Konbini. Puis après
quelques passages dans les Marseillais, et après quelques heures d’écoute en boucle au fin fond des cuisines
d’un kebab de quartier, finiront par tomber dans l’oubli. C’est certes une bonne chose pour nos oreilles,
mais ils sont vite remplacés par un autre rappeur qui va avoir un nom de scène qui ressemble soit à un
médicament, soit qui a une consonance en lien avec les pays du Maghreb. Car oui, la plupart de ces
artistes jetables sont issus de l’immigration.
Ce n’est pas le lot de tous bien sûr, et certains arrivent parfaitement à mener leur barque sur les flots
tumultueux de la scène. Parmi eux, on retrouve Orelsan. Aurélien Cotentin de son véritable nom, né à
Alençon d’une mère institutrice et d’un père directeur de collège. Rapidement, il enchaîne les succès avec de
nombreux albums qui font des cartons, et il se met à dos au passage quelques féministes du fait de ses paroles
crues et souvent qualifiées par ses détracteurs de « misogynes ». Il a actuellement 39 ans, sans enfant, éternel
ado errant dans sa vie.
[...] il leur faut aller toujours plus loin dans l’ethno-masochisme, montrer à quel point on est prêt à renier notre couleur de peau et notre culture, et si on peut cracher au passage sur notre pays - alors que certains ont des parents fonctionnaires qui sont les premiers à servir l’État - c’est encore mieux.
Julien,alias le Doc
Il y a chez les rappeurs un dénominateur commun plutôt fascinant, à l’instar de Nekfeu. Tous, pratiquement,
vénèrent la culture japonaise. C’est vrai que l’on ne va pas se mentir, le pays de Mishima dégage vraiment
quelque chose, une aura presque sacrée, et c’est peut-être car ce pays est resté le même du fait d’une
politique de tolérance zéro sur la question migratoire. Mais ne voilà-t-il pas qu’à l’écoute de son dernier
clip, Orelsan prône pour le vivre-ensemble (qui prouve chaque jour que c’est un succès dans notre pays) et
charge Éric Zemmour. Car bon, c’est tellement subversif et courageux de critiquer un
homme ennemi de 99,99% du paysage médiatique. Ainsi, on relève le premier paradoxe de ce type de
rappeur. D’un côté, ils idolâtrent une société traditionnelle qui repose sur des valeurs ancrées profondément
dans la culture japonaise. Valeurs que l’on pourrait qualifier comme étant de droite, voire même
nationalistes. De l’autre, ils critiquent dans leur propre pays des individus comme Zemmour qui passerait
presque pour un modéré dans le paysage politique japonais. Si seulement il s’agissait du seul paradoxe
pour ce seul individu. Malheureusement, ce n’est que le premier d’une myriade d’autres.
On peut citer un thème qui revient très fréquemment dans les textes d’Orelsan. Il s’agit de la critique de la
société de consommation et du capitalisme, avec pour toile de fond la critique de l’Empire Américain. Avec
son clone Nekfeu, on retrouve également le thème de l’uniformisation de la
société. Étonnement, je pourrais peut-être m’entendre avec eux sur ce point, car jusque-là ce sont des sujets
qui m’intéressent et dont je fais très souvent la critique dans mes vidéos. Cependant, il y a comme un goût
amer dans la bouche. Comment peut-on se placer comme un critique sérieux de la société de consommation,
de l’américanisation et de l’uniformisation des esprits, alors que l’on est l’un des premiers artisans de ces
phénomènes ? Eux qui vivent justement de cette même société de consommation par la vente des disques,
eux qui uniformisent la société en créant des individus qui écoutent les mêmes musiques avec des styles
vestimentaires qui singent les rappeurs. De plus, ce qui est parfaitement hypocrite est que la carrière
d’Orelsan est basée sur un mensonge originel, lui qui dans ses musiques ne cesse de mettre en avant un style
de vie nihiliste, où glander sur son canapé est synonyme de réussite. Que l’on apprécie ou pas Orelsan, il est
évident qu’il a forcément travaillé dur pour arriver là où il en est. C ‘est indéniable, et il ne faut pas être
malhonnête. Pourtant lui-même fait preuve de malhonnêteté, puisqu’il vend un style de vie à des jeunes,
celui de la défaite voire même d’une forme de lâcheté face aux obligations d’adulte. Alors que lui-même, roi
parmi les hypocrites, est aux antipodes de cette vision de la vie. Même s’il fut probablement un glandeur un
certain temps de sa vie, il n’en demeure pas moins qu’il ne l’est absolument pas aujourd’hui.
Alors il pourra toujours se cacher derrière « un personnage », en arguant qu’il ne faut pas prendre les
textes au sérieux. Pourtant, c’est bien ce que fait une partie de la jeunesse qui vit par mimétisme. Il en est de
même pour Nekfeu, lui qui a inondé les radios avec « Nique les clones » bien qu’il soit pourtant l’un des
pères fondateurs de cette nouvelle génération rap. Nos villes sont infestées de petites fraîcheurs qui campent
devant Citadium pour se sentir rappeur. C’est d’ailleurs une tentative naïve et absurde de retrouver une forme
de virilité en se vautrant dans la culture de l’autre, pour oublier que l’on n’arrive plus à trouver de modèles
dans l’Occident blanc.
Ce qui cependant reste au sommet du ridicule, est cette volonté des rappeurs comme Orelsan ou Nekfeu de
s’approprier des codes qui n’appartiennent ni à leur classe sociale ni à leur culture. Ce qui est en plus risible,
c’est cette logique de devoir faire plus que les autres, car au fond d’eux ils savent qu’ils ne sont pas vraiment
légitimes dans leur critique de la société. Ainsi, il leur faut aller toujours plus loin dans l’ethno-masochisme,
montrer à quel point on est prêt à renier notre couleur de peau et notre culture, et si on peut cracher au
passage sur notre pays – alors que certains ont des parents fonctionnaires qui sont les premiers à servir l’État
– c’est encore mieux. Pour être accepté dans ce milieu, il faut faire allégeance et donc de facto adopter les
codes d’une culture qui nous méprise et qui vient d’un monde anglo-saxon aux antipodes de nos valeurs et de
notre vision du monde, où là-bas le communautarisme et la race sont devenus des obsessions et des étendards
politiques. Ils veulent jouer les rebelles et les dissidents, mais en réalité ils sont parfaitement intégrés au
système et sont même au coeur du réacteur de celui-ci. Car ce qu’il faut bien comprendre, c’est que le rap a
perdu son message originel, celui d’une musique de dissident qui vise à remettre en cause l’ordre du
pouvoir. Le grand braquage, c’est justement cette récupération par le libéralisme de cette sous-culture pour
endormir la masse. Je me souviens également que Nekfeu avait allègrement « réclamé un autodafé pour ces
chiens de Charlie Hebdo ». Cependant, lui-même avait reconnu s’être « senti con » – selon sa propre
expression – après les attentats. Il s’agit d’une autre preuve de la tartuferie des rappeurs modernes qui
peuvent avoir dans leurs textes une violence extrême, mais une fois que cette violence se matérialise, qu’elle
devient réelle et palpable, il n’y a plus personne pour assumer.
Orelsan et Nekfeu sont les ambassadeurs les plus parfaits de cette fausse posture de rebelles, alors qu’ils font
la queue pour recevoir leur Victoire de la musique. D’ailleurs, le symptôme de l’insulte répétée envers la
droite ou plus généralement les patriotes, est le signe qu’ils ont peut-être véritablement compris que
désormais ceux qui sont à contre-courant, ce sont en réalité nous. Mais le disque va encore tourner au risque
de se rayer, et Morgane rédigera de nouveau un commentaire avec des milliers d’autres pour scander son
admiration dans le ballet presque parfait de l’uniformisation.

Julien, alias le Doc
Orelsan, l’idiot utile du système