La foi catholique et la France périphérique : un discret retour à la tradition

La France est-elle vraiment déchristianisée ? Pour y répondre, L’Étudiant libre vous propose une analyse d’un discret retour à la tradition chrétienne dans la France périphérique.
Cathédrale d'Angoulême

« La France est déchristianisée » cette phrase entendue et répétée, parfois avec fatalisme se révélera-t-elle obsolète dans quelques années ? À en croire les derniers chiffres de la Conférences des Évêques on peut presque l’espérer. Le chiffre a fait son petit buzz en ce début d’avril : 5 463 adultes baptisés au cours de la Vigile Pascale, 1000 de plus que l’année dernière et plus du double qu’il y a vingt ans. Les chiffres de l’enquête du catéchuménat 2023, révèlent plusieurs dynamiques particulièrement intéressantes pour la sociologie politique : le profil des baptisés est jeune, ce qui peut signifier un renouveau conservateur dans les années à venir, la foi catholique s’impose dans une société en quête de sens et les catéchumènes, avec leur profil plutôt « Gilets jaunes » témoignent d’un nouvel enracinement. 

Un retour de la tradition chrétienne en France, bien qu’il reste à démontrer dans les années à venir, pourrait être la seconde étape du renouveau conservateur promis après la génération « Manif pour tous » il y a tout juste dix ans. Ici encore, la relève est jeune : un tiers des nouveaux baptisés sont âgés de 18 à 25 ans – les trois quarts en ont moins de 40. À cet âge crucial où se forme une partie des convictions du jeune adulte, un retour des valeurs catholiques est un nouveau pied de nez à ceux qui voudraient que les jeunes baignent dans l’idéologie progressiste et abrutissante tel que nous le vendent les médias comme Brut et Konbini. Les jeunes qui se tournent vers la religion catholique sont souvent des personnes qui, selon le recteur de la cathédrale d’Angers, le Père François Gourdon, cherchent un sens à leur vie, ou bien des personnes qui ont traversé des épreuves comme le deuil ou la dépression. La foi catholique, l’amour miséricordieux promis par la croyance en Jésus Christ, semble être la voix la plus saine qui permettent de sortir de cette quête. La déchristianisation et le progressisme forcé, qui ont rompu de force toutes les attaches traditionnelles de notre mode de vie, provoquent une crise de la croyance dans notre pays. La conséquence directe étant le développement des croyances parallèles et ésotériques : les Français seraient plus de 41 % à adhérer aux thèses de l’astrologie et 28 % à croire aux envoûtements et aux sorcières… À côté, la petite augmentation des baptêmes semble refléter la redécouverte d’une foi plus historique et rationnelle pour répondre aux questionnements existentiels des jeunes générations. 

Le renouveau catholique dans la jeune génération témoigne d’un retour à des attaches conservatrices, du en partie à l’importance de la famille dite « traditionnelle ». Deux Français sur trois estiment en effet que le rôle du père et de la mère est complémentaire en matière d’éducation (Ifop 2019), loin de l’explosion de la famille nucléaire proposée comme nouvelle tendance à gauche de l’échiquier politique. Mais également au constat que face à la crise de sens que traverse notre société, ce ne sont pas les thérapies ou la médicamentation, mais bien la religion qui réussit à donner un but à la vie. La religion permet l’introspection. Elle permet une réflexion autour du Bien et du Mal que la sécularisation extrême de la société a fait oublier ou dont elle a minimisé l’importance. Les nouveaux catéchumènes viennent témoigner d’une soif de sens et de valeurs dans une société aseptisée par l’individualisme. Ce qui est intéressant avec ce renouveau c’est qu’elle peut permettre de faire émerger (ou réémerger) une communauté qui soit socialement diversifiée.

En effet, les jeunes (et moins jeunes) nouveaux catholiques sont loin des clichés catholiques, loin des Hubert, Marie-Caroline et autre Jehanne en Barbour et serre-tête en velours, la majorité des néophytes sont issus des classes « populaires » : 37% sont des ouvriers, employés et techniciens. Couplez ces données à celles qui les font provenir majoritairement des milieux ruraux et de familles de traditions catholiques mais n’ayant jamais été éduqués dans la foi chrétienne, et vous trouvez assez simplement le profil de la « France Périphérique » décrit par Christophe Guilluy. Ce renouveau catholique dans une France plus populaire peut être un nouvel argument pour la déconnexion fondamentale entre les élites urbaines, progressistes, déconnectées, mondialisées et une classe populaire plus enracinée, en quête de son histoire, l’histoire de France, de valeurs et de traditions. Le baptême est la première étape de la vie chrétienne et le processus est exigeant pour l’adulte, au moins deux ans de parcours de formation. Cette préparation loin de décourager permet à l’adulte de découvrir pleinement les valeurs qu’induit la religion catholique : chasteté, sobriété, prière, confession, humilité, confiance ou encore pardon. Des valeurs qui manquent cruellement dans une société où chacun est devenu juge de sa conduite (im)morale, où la défiance envers autrui s’est généralisée et où les liens sociaux disparaissent de manière inéluctable. Si le phénomène de rechristianisation s’amplifie dans les années à venir, il permettrait de venir reconstruire un tissu social français mélangeant (enfin) les classes sociales mais en les unifiant autour d’une tradition. 

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La religion catholique, que l’on croit ou pas en son mystère, est intimement liée à l’histoire et à la culture française, la compréhension de cette vérité étant parfaitement illustrée par Charles Péguy qui par son amour de la France devint catholique. Dans notre société où s’inquiéter de la disparition de la culture et de la religion catholique se révèle être un pléonasme. Les 5 000 nouveaux baptisés sont un espoir pour la société d’aujourd’hui et de demain.

 

Eloyse Gain

Eloyse Gain

Étudiante à l'ICES, Eloyse est membre de l'équipe de rédaction du site internet de l'Étudiant libre
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