Espérances, trahisons, et lendemains difficiles. Voilà, résumée en quelques mots, la récente histoire de la droite française. Depuis des années, elle se cherche, hantée par l’absence d’un leader qui fasse l’unanimité.
« Vous en avez assez de toute cette racaille ? »
Dès le milieu des années 2000 déjà, le règne de Jacques Chirac s’était achevé dans le sang et les larmes, marqué par une guerre fratricide entre Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy.
Sorti vainqueur du duel, le remuant maire de Neuilly, patron incontesté de l’UMP, s’était lancé avec vigueur dans la campagne présidentielle. Son programme, pour le moins droitier, n’avait pas manqué de séduire le bon peuple conservateur de France. Espérances.
Hélas – trois fois hélas ! –, la réalité s’était révélée moins brillante. Certes frappé par la crise de 2008, le quinquennat de Sarkozy fut surtout celui d’un quadruple reniement : retour dans le giron américain de l’OTAN, politique budgétaire inconséquente, désastreuse guerre en Libye et, last but not least, ratification de l’infâme traité de Lisbonne. Trahisons.
L’échec sarkozyste avait débouché, en 2012, sur l’élection de François Hollande à la présidence de la République. Après 17 années aux affaires, la droite était chassée de l’Élysée par un petit corrézien ventripotent. Lendemains difficiles.
« Merci pour ce moment »
Que le lecteur nous pardonne, on ne s’épanchera pas ici sur l’ubuesque mandat du susnommé corrézien. Non pas que ça ne nous ferait pas plaisir, mais ça n’est pas le sujet du jour. Nous voici donc arrivés en 2017. La victoire semblait promise à la droite, à qui le désastre socialiste avait laissé un boulevard.
Alors que tous se préparaient tranquillement à un duel Sarkozy-Juppé, François Fillon vint jouer les troubles fêtes, en remportant largement les primaires de la droite. Il était franc, inspirait la confiance, assumait son identité conservatrice et chrétienne, et voulait incarner la probité et le sérieux. La droite, enfin, avait trouvé son prince charmant. Espérances.
C’était sans doute trop beau. Au mois de janvier, l’affaire Pénélope éclatait au grand jour, et le prince charmant se mit à vaciller. Les jours s’ajoutant aux semaines, les révélations s’accumulaient, les dossiers gênants refaisaient surface. Fillon se cramponnait, jurait son innocence sur tous les plateaux télés. Peine perdue. Le 23 avril, il était battu par le duo Le Pen – Macron. Fillon n’était sans doute pas coupable de tout ce qu’on lui a reproché, certes. L’honneur eut d’ailleurs pu être sauf, si le candidat déchu ne s’était pas empressé, au soir du premier tour, d’appeler à voter pour Emmanuel Macron. Trahisons.
Jupiter, puisqu’on parle de lui, ne se fit d’ailleurs pas prier pour enfoncer les évidentes défaillances du FN, au cours d’un second tour aussi mémorable que douloureux. Et remporta sans trop de difficultés une élection pourtant promise à la droite. Lendemains difficiles.
On prend les mêmes et on recommence ?
Deux plus tard, la droite n’a pas beaucoup avancé. Puisqu’il fallait bien remplacer Fillon, elle a largement élu Laurent Wauquiez à la tête du parti. Mais celui qui rêve d’incarner un Sarkozy nouvelle génération – sans le talent – peine à convaincre dans ses propres rangs. Néanmoins, et comme des rats quittant le navire, les éléments les plus progressistes du parti fuient le discours droitier de notre grisonnant auvergnat. Et tout en s’affichant aux côtés du sulfureux Eric Zemmour, il a désigné, pour mener sa barque lors des européennes, François-Xavier Bellamy, un philosophe conservateur et catholique, apprécié des jeunes et aux positions sociétales tranchées. Espérances.
La candidature de Bellamy semble enthousiasmer la France conservatrice. Encore, toujours, elle continue à croire aux promesses d’un parti qui n’a jamais cessé de décevoir. Jusqu’à quand continuera-t-elle d’accorder des chèques en blanc au premier beau parleur venu ? Il s’agirait, une fois n’est pas coutume, d’apprendre de ses erreurs…